Le 1er novembre 2023, a été lancée la 16e édition du mois de l’économie sociale et solidaire. L’économie sociale et solidaire (ESS) regroupe des entreprises qui poursuivent un but d’utilité sociale et de solidarité.
L’économie sociale et solidaire (ESS) est un modèle économique au fonctionnement collectif et à la gouvernance démocratique. Orienté par une éthique qui place l’homme plutôt que le profit au centre de son fonctionnement, ce type d’économie constitue un tiers secteur, entre le public et le privé. Son objectif premier n’est pas tant lucratif que guidé par un projet social, ou encore environnemental.
Encadrée par la loi depuis 2014, l’économie sociale et solidaire s’est popularisée ces dernières années, parallèlement à un souci croissant de développement écologique et durable.
Quel cadre juridique ?
La loi relative à l’économie sociale et solidaire du 31 juillet 2014 (loi Hamon) définit l’ESS comme “un mode d’entreprendre et de développement économique adapté à tous les domaines de l’activité humaine auquel adhèrent des personnes morales de droit privé” qui remplissent les condition suivantes :
- un but poursuivi autre que le seul partage des bénéfices ;
- une gouvernance démocratique, définie et organisée par les statuts, prévoyant l’information et la participation, dont l’expression n’est pas seulement liée à leur apport en capital ou au montant de leur contribution financière, des associés, des salariés et des parties prenantes aux réalisations de l’entreprise ;
- une gestion conforme à deux principes : les bénéfices sont majoritairement consacrés à l’objectif de maintien ou de développement de l’activité de l’entreprise et les réserves obligatoires constituées, impartageables, ne peuvent pas être distribuées.
Cette loi consacre au plan juridique un modèle entrepreneurial qui s’est développé depuis les années 1970. Impulsée par des initiatives militantes, l’économie sociale et solidaire se présente comme une alternative aux politiques verticales.
Dès 1981, des actions locales diverses se développent pour offrir des emplois dans un contexte de chômage de masse et de crise économique. Émergent ainsi de nouvelles formes d’échange plus équitables et des modes de production plus soutenables.
Une diversité des formes juridiques de l'ESS
L’économie sociale et solidaire, de par son histoire, accorde une place importante à la diversité des statuts qu’elle recoupe. Ces statuts sont eux-mêmes représentatifs de la variété des activités qui la composent :
- associations locales ou internationales ;
- mutuelles à but non lucratif, actrices de la santé et des assurances ;
- fondations de personnes ou d’entreprises ;
- entreprises commerciales qui respectent les principes fondateurs de l’ESS : leur finalité sociale est prioritaire par rapport à leurs objectifs économiques ;
- coopératives, dont les membres associés détiennent au moins une part dans la structure. Parmi ces dernières, deux types de coopératives sont d’ailleurs régulièrement privilégiées par les acteurs de l’économie sociale et solidaire pour organiser leurs activités : les Scop (société coopérative et participative) et les Scic (sociétés coopératives d’intérêt collectif).
Au-delà de leurs statuts juridiques variés, la taille des entreprises de l’économie sociale et solidaire est également très variable. Certaines relèvent d’initiatives aussi fortement ancrées dans le local que des associations sportives de lycée, tandis que d’autres comptent des milliers de salariés comme Emmaüs, par exemple.
Aux origines de l'économie sociale et solidaire
Bien que récemment restructuré juridiquement, le modèle économique coopératif a des origines anciennes. Les guildes, les corporations d’artisans, les confréries, ou encore le compagnonnage représentaient en effet dès le Moyen-Âge des formes d’organisation économique associatives.
Quelques repères historiques
1830 : Le terme d’économie sociale apparaît pour la première fois dans le Nouveau traité d’économie sociale rédigé par Charles Dunoyer.
1884 : La loi Le Chapelier, qui proscrivait les corporations des métiers et les rassemblements paysans et ouvriers tels que le compagnonnage, est définitivement abrogée.
1895 : Le statut de la coopérative est déclaré.
1901 : La loi sur la liberté d’association est promulguée.
1947 : La loi définissant le statut de la coopération est promulguée.
1980 : La charte de l’économie sociale, définissant ses principes et valeurs, est publiée.
1981 : Une délégation interministérielle à l’économie sociale est créée.
2000 : Un secrétariat d’État à l’économie sociale et solidaire est créé.
2001 : La Charte européenne de l’économie sociale est promulguée.
2006 : Le Conseil supérieur de l’économie sociale, instance de concertation entre les pouvoirs publics et le secteur est créé.
2014 : La loi économie sociale et solidaire, dite loi Hamon, est promulguée.
Un modèle économique utopique ?
Selon le CNCRESS, les valeurs clés de l’économie sociale et solidaire sont :
- une finalité orientée vers l’intérêt général ou collectif ;
- une gouvernance démocratique basée sur le principe “une personne, une voix” ;
- une lucrativité limitée ;
- une primauté de la personne humaine sur le capital ;
- un ancrage territorial fort ;
- un esprit de libre adhésion.
L’économie sociale et solidaire se distingue par une proportion élevée d’emplois occupés par des femmes : en 2017, elles y constituent 68% des employées et plus de la moitié des cadres. Ces chiffres sont représentatifs d’un esprit paritaire qui contraste avec les proportions mesurées dans le secteur privé.
Concernant la gouvernance collective et démocratique revendiquée par l’ESS, on observe toutefois souvent un écart entre théorie et pratique au sein des structures. De même, l’idéal collectif et démocratique qui préside à ces organisations est parfois difficile à mettre en pratique. Ainsi, la prise en compte des intérêts de l’ensemble des parties prenantes impliquées dans leurs activités n’est pas toujours effective. À titre d’exemple, le fait de mêler objectif social et statut entrepreneurial peut susciter des modalités d’implication professionnelle ambiguës. À la fois militants et employés, les salariés ont parfois du mal à déterminer comment faire valoir certains de leurs droits.